Les débuts
Villeneuve débute en sport automobile avec une Mustang Boss 1971 similaire à celle-ci.
Passionné par l'automobile depuis son enfance, Gilles Villeneuve débute sa carrière à sa sortie du cégep. Il s'inscrit tout d'abord dans des épreuves d'accélération (dragsters) au volant de sa Ford Mustang personnelle, mais faute d'argent, se tourne rapidement vers les épreuves de motoneige, financièrement plus abordables, mais surtout plus lucratives. Cette fructueuse première partie de carrière débouche sur un titre de champion du monde en 1974 ainsi que de multiples titres au Canada et aux États-Unis. Grâce à l'argent accumulé en tant que pilote professionnel de moto-neige, Gilles peut parallèlement retourner à son premier amour : la course automobile. En 1973, après un passage par l'école de pilotage de Jim Russell sur le circuit de Mont-Tremblant, il dispute et remporte le championnat du Québec de Formule Ford avec sept victoires en dix courses.
L'année suivante, il accède à la Formule Atlantic. Après une première saison ratée en 1974, sa situation financière devient de plus en plus critique, mais les succès commencent à venir en 1975, avant qu'il ne se révèle véritablement en 1976. Vainqueur de neuf courses sur dix, il remporte les championnats américains et canadiens de Formule Atlantic. Mais son plus beau fait d'arme a lieu lors de l'épreuve de Trois-Rivières, où au prix d'une attaque de tous les instants, il s'impose en battant plusieurs pilotes de Formule 1 invités. Parmi eux se trouve le Britannique James Hunt, sur le point de décrocher le titre de champion du monde de Formule 1. Impressionné par le pilotage spectaculaire du jeune Québécois, le leader de l'écurie McLaren s'empresse de le recommander à son employeur dès son retour en Europe.
1977 : premiers pas en Formule 1
En 1977, Villeneuve pilote toujours en Formule Atlantic lorsque McLaren lui offre l'occasion de débuter en Formule 1 à l'occasion du GP de Grande-Bretagne, disputé à Silverstone, au volant de la troisième voiture de l'écurie la McLaren Ford M23, portant le numéro 40. Retardé en début de course par des ennuis moteur, Villeneuve termine à une anonyme 11e place, mais ses temps au tour et son sens de l'attaque n'échappent pas à Enzo Ferrari qui, séduit, lui propose un test à Fiorano au mois de septembre. Le test s'avère suffisamment concluant pour que la Scuderia Ferrari l'engage pour les deux dernières courses de la saison sur la troisième voiture de l'équipe. Suite au brusque départ de Niki Lauda, fâché avec la direction de la Scuderia, c'est en réalité en qualité de deuxième pilote que Villeneuve fait ses débuts chez Ferrari. Douzième du GP du Canada, il est impliqué au GP du Japon dans un tragique accident puisque suite à un accrochage avec la Tyrrell 6 roues de Ronnie Peterson, sa voiture décolle et vient s'écraser au-delà des barrières de sécurité, tuant deux personnes (un photographe et un officiel).
1978 : apprentissage difficile
Les véritables débuts en Formule 1 de Villeneuve ont lieu en 1978. Dans un premier temps, il éprouve toutes les peines du monde à confirmer les espoirs placés en lui. Nettement dominé par son coéquipier argentin Carlos Reutemann, ses compétences sont mises en doute par les très exigeants médias italiens, qui réclament son remplacement. Mais Villeneuve trouve peu à peu ses marques et termine sa première saison complète en F1 de la plus belle des façons, puisqu'il remporte à Montréal son GP national, levant du même coup tous les doutes sur ses capacités à piloter au plus haut niveau.
1979 : l'occasion manquée
Gilles Villeneuve à Imola en 1979.
En 1979, suite au départ de Reutemann pour Lotus, Villeneuve est rejoint chez Ferrari par l'expérimenté pilote sud-africain Jody Scheckter. Après un début de saison dominé par les Ligier, les Ferrari ne tardent pas à s'affirmer comme les meilleures voitures du plateau. Vainqueur coup sur coup du GP d'Afrique du Sud puis du GP des États-Unis Ouest à Long Beach, Villeneuve prend ainsi la tête du championnat. Mais la suite est plus difficile pour le Québécois, qui subit la loi de Jody Scheckter, quasiment aussi performant que lui tout en faisant preuve d'une plus grande science de la course. Inexorablement distancé au championnat, Villeneuve laisse définitivement échapper le titre à l'issue du GP d'Italie, antépénultième manche de la saison où, respectueux des consignes d'équipe, il ne cherche pas à contester la victoire à son coéquipier et ami et se contente d'assurer le doublé pour Ferrari. En remportant en fin de saison le GP des États-Unis à Watkins Glen, Villeneuve décroche tout de même le titre honorifique de vice-champion du monde.
Mais la saison 1979 de Villeneuve est loin de se résumer à un duel perdu pour le titre face à Scheckter. Cette année-là, en dehors de ses trois succès, il réalise deux prestations qui marqueront durablement les esprits. Tout d'abord au GP de France disputé à Dijon, où dans les derniers tours de course, il livre au Français René Arnoux un duel d'une intensité jamais égalée en Formule 1. En se doublant, en se redoublant, en abordant plusieurs virages de front et en se touchant à plusieurs reprises, les deux pilotes font se lever le public qui en oubliera presque qu'il ne s'agit là que d'une lutte pour la deuxième place. Au GP des Pays-Bas à Zandvoort ensuite, où auteur d'un début de course tonitruant (marqué par un dépassement plein d'audace sur Alan Jones par l'extérieur du virage Tarzan), Villeneuve est victime d'une crevaison. Mais loin de se ranger sagement sur le bord de piste, il continue d'attaquer au volant d'une voiture complètement déséquilibrée, tantôt sur trois roues, tantôt sur deux roues, tandis que son pneu déchiqueté arrache des éléments de carrosserie. À son retour aux stands, il faudra toute la force de persuasion de ses mécaniciens pour le convaincre de renoncer.
1980 : une saison catastrophique
La Ferrari 312T5 de Villeneuve au Musée de l'automobile de Turin.
La Ferrari 312T5 de Villeneuve lors de la saison 1980.
En 1980, Gilles Villeneuve est très attendu. Compte tenu de sa pointe de vitesse de plus en plus affûtée et de son expérience grandissante, il semble en mesure de prendre sa revanche sur Scheckter au championnat du monde. C'est sans compter sur le catastrophique niveau de la Ferrari 312 T5. Évolution de la voiture qui l'année précédente, malgré son utilisation partielle de l'effet de sol (l'usage du large moteur Flat 12 ne permet pas de concevoir une véritable wing car) parvenait à tenir la dragée haute aux wing cars, la 312 T5 s'avère complètement dépassée. Souvent qualifié dans la deuxième moitié de la grille de départ, Villeneuve ne parvient à arracher que six maigres points malgré des efforts jamais comptés. C'est toujours mieux que son équipier Scheckter qui, démotivé, annoncera rapidement son départ à la retraite et connaîtra même le déshonneur d'une non-qualification.
1981 : dompter la puissance
À partir de 1981, la Scuderia Ferrari amorce son retour au premier plan grâce à son adoption de la technologie du moteur turbocompressé, déjà utilisée par Renault depuis 1977. D'une puissance redoutable, le moteur de la Ferrari 126C1 est toutefois particulièrement difficile à exploiter, en raison de son temps de réponse. À cela s'ajoute un châssis à la tenue de route plus que précaire. Après un début de saison catastrophique, Villeneuve va pourtant réagir sur le circuit où on l'attend le moins et qui semble le moins correspondre aux caractéristiques de sa voiture, en l'occurrence Monaco, où il réalise un véritable numéro d'équilibriste entre les rails pour guider sa machine vers la victoire. Il récidive lors du GP suivant disputé sur le tracé de Jarama en Espagne, où un départ fulgurant conjugué à l'abandon précoce du champion du monde en titre Alan Jones lui permet de prendre la tête de la course en début d'épreuve. Durant tout le reste du GP, il parvient à contenir la meute de ses poursuivants, plus rapides que lui, en bouchonnant astucieusement dans les parties sinueuses et en utilisant toute la puissance de son moteur turbo dans les lignes droites. Sur la ligne d'arrivée, Villeneuve sauve sa première place tandis que quatre pilotes sont regroupés en moins d'une seconde derrière lui. Le Québécois réalise une autre prestation mémorable en fin d'année à Montréal, où sous la pluie, il se classe troisième malgré un aileron avant à la verticale, conséquence d'un accrochage en début de course.
1982 : le drame de Zolder
Les progrès réguliers de la Ferrari turbo font de Villeneuve l'un des favoris de la saison 1982. Dominé par Alain Prost et sa Renault lors des premières manches de la saison, il entend bien prendre sa revanche à domicile , à l'occasion du GP de Saint-Marin, boycotté par les équipes FOCA. L'abandon précoce des Renault lui ouvre la voie d'un facile succès, tandis que juste derrière lui, son équipier et ami Didier Pironi semble assurer le doublé de la Scuderia. Conscient de l'importance de ce résultat d'ensemble après un début de saison raté, le stand Ferrari passe à ses pilotes le panneau SLOW, qui signifie qu'ils doivent baisser le rythme et qui est donc un ordre implicite de figer les positions. Pourtant, Pironi attaque Villeneuve et entreprend de le doubler. Pensant dans un premier temps que son équipier le dépasse par jeu et cherche avant tout à divertir un public qui a été privé d'une vraie course, Villeneuve se rend pourtant rapidement compte que Pironi cherche réellement à lui contester la victoire et a toutes les peines du monde à reprendre le commandement de l'épreuve. S'en suit un duel fratricide dont Pironi sort finalement vainqueur. Sur le podium d'après course, Villeneuve, les mâchoires serrées, refuse ostensiblement de saluer Pironi et d'ouvrir la traditionnelle bouteille de champagne. S'estimant trahi par celui qui en dehors des circuits était également un ami proche, il prononce des paroles de vengeance à l'encontre du pilote français.
La March Engineering de Jochen Mass que Villeneuve a percutée à Zolder en 1982.
Le GP suivant se déroule à Zolder en Belgique. Toujours furieux, Gilles Villeneuve est plus que jamais décidé à prendre sa revanche. Le duel est lancé dès les qualifications où les deux hommes luttent pour arracher la pole position. C'est à cette occasion que Villeneuve trouve la mort. Lancé à haute vitesse, il rattrape la March de Jochen Mass qui roule au ralenti. Constatant l'arrivée de la Ferrari dans ses rétroviseurs, Mass change de ligne pour lui ouvrir le passage, au moment même où le Canadien entreprenait de le déboîter. La Ferrari heurte très violemment la March par l'arrière, puis décolle, avant de retomber lourdement et de partir dans une série de tonneaux au cours de laquelle Gilles est éjecté. Gisant inanimé dans un grillage de protection, Gilles est transporté d'urgence à l'hôpital le plus proche, où son décès est prononcé dans la soirée. L'enquête démontrera que Villeneuve a probablement été tué dès le choc initial avec la March, les vertèbres cervicales brisées.
Les circonstances de l'accident de Gilles Villeneuve font encore aujourd'hui l'objet de thèses contradictoires. Pour certains, Villeneuve était lancé dans un tour de qualification au moment où il a rattrapé Mass, ce qui expliquerait sa volonté de ne pas lever le pied. D'autres estiment au contraire que Villeneuve venait déjà d'effectuer un tour rapide et que l'accident a donc eu lieu dans son tour de rentrée aux stands, effectué à une vitesse anormalement élevée, ou alors dans une tentative désespérée d'effectuer un deuxième tour rapide avec le même train de pneus.
Résultats en championnat du monde de Formule 1 [modifier]
Saison Ecurie Châssis Moteur Pneus GP disputés Victoires Pole positions Meilleurs tours Points Classement
1977 McLaren
Ferrari M23
312T2 Cosworth V8
Ferrari 12 à plat Goodyear 3 0 0 0 0 n.c.
1978 Ferrari 312T2
312T3 Ferrari 12 à plat Michelin 16 1 0 1 17 9e
1979 Ferrari 312T3
312T4 Ferrari 12 à plat Michelin 15 3 1 6 53 2e
1980 Ferrari 312T5 Ferrari 12 à plat Michelin 14 0 0 0 6 10e
1981 Ferrari 126CK Ferrari V6 turbo Michelin 15 2 1 1 27 7e
1982 Ferrari 126C2 Ferrari V6 turbo Goodyear 4 0 0 0 6 15e
Victoires en Championnat du monde de Formule 1
# Année Manche Grand Prix Circuit Écurie Voiture
1 1978 16/16 Canada Montréal Ferrari 312T3
2 1979 03/15 Afrique du Sud Kyalami Ferrari 312T4
3 1979 04/15 États-Unis Ouest Long Beach Ferrari 312T4
4 1979 15/15 États-Unis Est Watkins Glen Ferrari 312T4
5 1981 06/15 Monaco Monaco Ferrari 126CK
6 1981 07/15 Espagne Jarama Ferrari 126CK